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Organic’Vallée : une nouvelle organisation pour un retour au sol de la matière organique  

Camille Lacour

MOTS-CLÉS : ORGANIC’VALLÉE, BIODÉCHETS, VALORISATION AGRICOLE, ÉCONOMIE CIRCULAIRE

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Encore aujourd’hui, les déchets orga-niques sont une ressource non complètement exploitée. En 2014, 74,8 millions de tonnes de déchets organiques ont été produites et seulement la moitié a été recyclée, l’autre moitié étant incinérée ou enfouie (Commissariat général au développe-ment durable, 2017). Dans la région de Toulouse, à Bélesta-en-Lauragais, l’entreprise Cler Verts, spécialisée dans le traitement des biodéchets, réfléchit dès les années 2010 à une valorisation optimale de la matière organique du territoire. De cette réflexion va naître en 2014 la société coopérative d’intérêt collectif (Scic) Organic’Vallée, visant à valoriser localement les biodéchets pour un retour au sol de la matière. Nous verrons com-ment cette innovation organisationnelle permet une valorisation agricole efficace et répond aux enjeux actuels de la gestion des biodéchets.

LE RECYCLAGE DES DÉCHETS ORGANIQUES : UNE TÂCHE COMPLEXE MAIS NÉCESSAIRE

L’épuisement des ressources et le changement climatique nous obligent à repenser l’utilisation de la matière et de l’énergie. Le recyclage, c’est-à-dire l’ensemble des techniques de transformation des déchets après récupération, visant à en réintroduire tout ou une partie dans un cycle de production (ADEME, 2014), apparaît comme une piste majeure pour répondre à ces problématiques. D’une part, le recyclage permet de diminuer la pression exercée sur nos ressources et les impacts environnementaux liés à l’extraction des matières. D’autre part, le tassement et la combustion des déchets lors de la mise en décharge et de l’incinération génèrent des émissions de gaz à effet de serre (GES) contribuant au changement climatique (Ministère de la Transition écologique et solidaire, 2017).

La loi de transition énergétique votée en 2015 prévoit de réduire d’ici 2025 l’élimination des déchets organiques par stockage de 50 % par rapport à 2010 et de porter à 65 % les tonnages orientés vers le recyclage et la valorisation organique (Commissariat général au développement durable, 2017). Nous nous intéressons ici unique-ment au recyclage des biodéchets [1] ; la valorisation des boues d’épuration faisant partie aussi des déchets organiques ne sera pas traitée.

La limite majeure du recyclage des biodéchets n’est pas technologique. Par nature, ces déchets peuvent être dégradés par des processus biophysiques et sont source d’énergie. La réelle difficulté est leur séparation d’avec les matériaux non bio-dégradables. Le tri à la source des biodéchets et leur valorisation sont obligatoires depuis le 1er janvier 2012 pour les gros producteurs de déchets [2] et en 2025, les collectivités seront dans l’obligation de proposer une solution de tri des déchets organiques pour les particuliers (Ministère de la Transition écologique et solidaire, 2017).

Différents outils apparaissent pour les acteurs publics et privés : une gestion de proximité avec un traitement sur place (compostage domestique ou partagé), et une collecte séparée (en porte à porte ou en apport volontaire) avec un traitement centralisé (compostage industriel, méthanisation) [ADEME, 2017]. Ces outils sont complémentaires et doivent être pensés selon les spécificités du territoire. Cependant, plusieurs freins sont à noter dans la mise en place de ce tri à la source (Veolia, 2015) :
→ le coût de la mise en œuvre d’un système de tri mal estimé ;
→ l’absence d’éco-organismes (sociétés privées investies par les pouvoirs publics pour la gestion des déchets d’une filière spécifique) ;
→ le schéma logistique à repenser ;
→ le manque d’unité de valorisation près des territoires ;
→ un taux de participation des particuliers trop faible.

Ainsi, le recyclage des biodéchets amène de nouvelles problématiques mais également des opportunités pour dynamiser le territoire : création d’emplois, de revenus, d’un réseau territorial.

LE DÉBOUCHÉ AGRICOLE : UNE VALORISATION PERTINENTE DE LA MATIÈRE ORGANIQUE

Premièrement, un retour au sol de la matière organique est aujourd’hui nécessaire, car les sols français sont globalement appauvris en matière organique (Gis Sol, 2016) et celle-ci est indispensable pour que le sol conserve ses fonctions agronomiques et environnementales. Elle permet (Chambre d’agriculture Occitanie, 2010) :
→ d’assurer le stockage et la mise à disposition pour la plante des éléments nutritifs par la minéralisation ;
→ de stimuler l’activité biologique en étant source d’énergie et d’éléments nutritifs ;
→ de structurer le sol et de le stabiliser face aux agressions extérieures ;
→ de contribuer à la perméabilité, à l’aération du sol et à sa capacité de rétention d’eau ;
→ d’influencer les autres compartiments de l’environnement en participant au maintien de la qualité de l’eau et de l’air.

En revanche, la matière organique peut potentiellement libérer des polluants et des gaz à effet de serre en lien avec une minéralisation trop importante. Il est donc important de main-tenir un stock de carbone adéquat pour assurer les fonctions de la matière organique et limiter le relargage d’éléments non désirés (Chambre d’agriculture Occitanie, 2010).

Deuxièmement, la production d’amendements organiques à partir de biodéchets permettrait de diminuer, voire d’abandonner, l’utilisation d’engrais minéraux de synthèse, coûteux en énergie et en matière fossile (Ministère de la Transition écologique et solidaire, 2017).

CLER VERTS : UN ACTEUR IMPLIQUÉ DANS LA VALORISATION DE LA MATIÈRE ORGANIQUE

Cler Verts est une petite et moyenne entreprise (PME) familiale créée en 2003 à Bélesta-en-Lauragais, à 45 km de Toulouse, par Jean-Luc Da Lozzo et Gérard Lanta.

Les différentes activités de traitement de la matière organique réalisées par Cler Verts

Cler Verts est spécialisé dans le recyclage des biodéchets provenant de gros et moyens producteurs de biodéchets dont les industries agro-alimentaires (IAA), de la grande distribution et de la restauration collective (restaurants d’entre-prises et scolaires) ainsi que des collectivités de la région toulousaine. Elle comporte deux sites : l’un à Bélesta-en-Lauragais ayant une activité de compostage, de valorisation du bois et de méthanisation, et l‘autre à Villefranche-de-Lauragais, où se situent une déchetterie pour les artisans et les bureaux de Cler Verts. L’activité repose sur trois pôles : la valorisation de la matière organique [Tableau 1], la réalisation de services extérieurs (collecte, broyage et criblage des biodéchets) et enfin la mise à disposition d’une déchetterie pour les artisans, permettant le dépôt de métaux, gravats, plastiques, cartons, déchets verts, bois brut et traité.

La collecte de biodéchets par Cler Verts regroupe plus de deux cents points de collecte régionaux : Mc Donald, Casino, Auchan, Carrefour, Intermarché, Grand Frais, Super U, hôpitaux de Toulouse, restaurants d’entreprises à Toulouse, etc. Pour donner un ordre d’idée, un hypermarché produit environ 150 tonnes de biodéchets par an et un supermarché environ 60 tonnes par an. La restauration atteint le statut de gros producteur à partir d’environ deux cents couverts, en comptant environ 140 grammes de biodéchets gaspillés par client. La capacité de traitement de Cler Verts [Tableau 1] ne permet pas la valorisation de la totalité des biodéchets produits par tous ces gros producteurs. Ainsi, Cler Verts a créé des partenariats avec d’autres entreprises de traitement des biodéchets, telles qu’APAG environnement.

Les biodéchets arrivent sous forme de bar-quettes, plats préparés emballés, et leur traitement demande une première étape de déconditionnement pour séparer la partie bio-dégradable des emballages non biodégradables. L’atelier de déconditionnement repose sur une presse puis une centrifugeuse. Les emballages en plastique sont ensuite incinérés. La matière organique obtenue va alors être valorisée soit par compostage, soit par méthanisation. Le com-post obtenu sera valorisé sur des sols agricoles ou espaces verts publics et privés. À partir de la méthanisation, du biogaz et du digestat seront obtenus. Le biogaz pourra être intégré dans le réseau de gaz naturel pour produire de l’électricité et le digestat pourra être vendu comme fertilisant.

En résumé, Cler Verts propose différentes voies de valorisation de la matière organique : de la matière (compost, digestat, bois meuble et bois énergie) et de l’énergie (biogaz). Ce recyclage est réalisé avec une volonté profonde de valoriser la matière organique localement et d’optimiser les impacts environnementaux du traitement.

Les atouts de Cler Verts : une mutualisation de la collecte et une unité de valorisation au plus près du territoire

Le transport des déchets représente 30 % des émissions de gaz à effet de serre générées dans le domaine de la gestion des déchets. Ces émissions sont pro-duites en majorité pendant la phase de collecte (Monier et al., 2014). Le transport et la logistique sont de plus coûteux, représentant près de la moitié des dépenses annuelles de la gestion des déchets. Ainsi, l’optimisation du transport des déchets jusqu’au site de traitement est un enjeu majeur.

Cler Verts propose un service de traitement des biodéchets, unique en France, adapté à la filière de la grande distribution et des restaurateurs professionnels : écoDistri® et écoResto®, marques déposées respectivement depuis 2014 et 2012. L’offre inclut la formation du personnel, la mise à disposition de matériels spécifiques, un service de collecte et de recyclage des biodéchets. Cette offre est adaptée aux besoins spécifiques des acteurs, avec différents matériels de collecte : caisses palettes, conteneur, sacs compostables, tables de tri, etc., et une fréquence de collecte adaptée au gisement organique à évacuer. La collecte est basée sur un principe de « vide pour plein », c’est-à-dire la restitution d’un bac vide pour la collecte d’un bac plein, ce qui permet de laver et désinfecter les bacs à chaque rotation. Du compost est ensuite restitué à ces producteurs de biodéchets sur le principe suivant : 1 € de chiffre d’affaire égale 1 kg de compost. Celui-ci est valorisé sur les espaces verts de l’établissement ou donné à une association de jardins familiaux du territoire.

Les marques écoDistri® et écoResto® sont rat-tachées à une charte non publique qui permet au client de connaître et par conséquent de faire confiance à la prestation (Cler Verts, 2011).

Ce service est innovant, car d’une part la collecte des déchets des gros producteurs est une nouveauté et Cler Verts a su proposer une offre adaptée et locale avec une unité de valorisation de proximité ; et d’autre part, Cler Verts mutualise le transport des biodéchets au sein de la filière, permettant ainsi d’optimiser le taux de remplis-sage des véhicules et les trajets.

Cler verts propose donc un schéma logistique réduisant les impacts environnementaux associés au transport.

Voyons maintenant comment l’activité de Cler Verts peut intégrer une valorisation agricole des déchets traités.

CLER VERTS : UNE PLATEFORME DE TRAITEMENT DIVERSIFIÉE POUR UNE VALORISATION AGRICOLE EFFICACE

La localisation de Cler Verts est pertinente, car le bassin toulousain présente des sols particulièrement appauvris en matière organique par rapport au reste de la France (Gis Sol, 2016). De plus, la diversité des biodéchets collectés et les différents procédés de valorisations effectués par Cler Verts [Figure 1] permettent la production d’amendements diversifiés. Les effets des com-posts sont différents en fonction des matières premières dont ils sont issus et dépendent du procédé de compostage : temps de fermentation et de maturation, nombre de retournements, saison, apport en eau. Les amendements de Cler Verts peuvent ainsi répondre aux besoins spécifiques des sols en fonction de leur type, de leur état initial et du système de culture appliqué (Huber et Schaub, 2011).

Une autre étape clé de la production de com-posts de bonne qualité pour une valorisation efficace en agriculture est le tri à la source. En effet, les biodéchets et les déchets verts sont souvent pollués par des matériaux non dégradables. Cette pollution entraîne un surcoût dans le traitement car il est alors nécessaire de cribler très fine-ment le compost pour éliminer les particules polluantes. Cler Verts intègre cette étape de criblage dans le modèle économique de son offre de services [Tableau 1] en proposant différents calibres de compost selon l’utilisation finale de celui-ci (maraîchage, grande culture, espaces verts, etc.).

En plus de ce premier modèle, capable d’aboutir à une offre plurielle de produits de qualité issus de biodéchets, Cler Verts a souhaité aller plus loin dans la valorisation de la matière organique en portant la création de la Scic Organic’Vallée.

ORGANIC’VALLÉE : UNE SCIC POUR ALLER PLUS LOIN DANS L’ÉCONOMIE CIRCULAIRE !

La Scic est une forme innovante de société permettant de faire converger les intérêts privés vers un intérêt collectif. Elle représente un nouvel outil de développement local permettant de rassembler les acteurs d’un territoire autour d’un objectif commun (Cap Rural, 2016). Une Scic a pour objet la production ou la fourniture de biens ou de services d’intérêt collectif présentant un caractère d’utilité sociale. Elle est organisée sous forme de sociétés anonymes ou de sociétés à responsabilité limitée avec une gestion désintéressée (réinvestissement des excédents dans l’activité de la société).

Une Scic doit comprendre au moins trois catégories d’associés : salariés, bénéficiaires et un troisième type (entreprise, association, etc.), et respecter les règles coopératives, à savoir une personne égale une voix (Cap Rural, 2016).

Le projet d’Organic’Vallée

Organic’Vallée est un site d’agroactivité créé en juin 2015 à Bélesta-en-Lauragais. Ce site s’étend sur 55 hectares de terres agricoles et regroupe actuellement une salariée Anne Victor (ingénieure responsable du projet) et des agriculteurs : un maraîcher sur sol vivant, un éleveur de porcs noirs gascons, une éleveuse d’escargots, la structure Fungus Sapiens. Il accueillera dans le futur de nouveaux porteurs de projet, tels qu’une ferme auberge, une éleveuse de volailles et un atelier de transformation. Ce site d’agroactivité est certifié « Engagement Biodiversité » et accueille des agriculteurs certifiés en agriculture biologique.

Le modèle proposé par Organic’Vallée repose sur la valorisation locale de la matière orga-nique avec la création de deux boucles de matière [Figure 2] :
→ une boucle entre les occupants agricoles d’Organic’Vallée et Cler Verts : Cler Verts traite les déchets de la Scic (épluchures, fumier, déchets verts, etc.) et les restitue ;
→ une boucle entre les occupants agricoles d’Organic’Vallée et la région Occitanie (plus précisément l’aire urbaine de Toulouse) : Cler Verts collecte une partie des biodéchets des gros producteurs et des collectivités de l’aire urbaine, les traite et restitue un compost utilisable en agriculture biologique ou de l’énergie par méthanisation.

Dans les années à venir, Organic’Vallée souhaite fermer cette deuxième boucle de matière en ouvrant une épicerie sur Toulouse qui propose des aliments produits sur les 55 hectares agricoles.

Le modèle proposé par Organic’Vallée permet non seulement une valorisation agricole locale des biodéchets mais aussi :
→ le développement de la résilience du territoire en favorisant des productions locales ;
→ la création d’emplois non délocalisables (actuellement la salariée d’Organic’Vallée et les quatre occupants agricoles de la Scic) ;
→ la sensibilisation des acteurs du territoire en invitant les consommateurs sur la Scic et en proposant des formations aux entreprises et collectivités ;
→ la création et le renforcement du lien social et urbain / rural (Scic Organic’Vallée, 2017).

La Scic est financée jusqu’en 2018 par l’État. D’ici là, elle compte être autonome financière-ment grâce au revenu foncier (loyers payés par les occupants agricoles), à des formations et à des financements participatifs. La formation est actuellement le levier de financement le plus étudié, l’idée étant de former les entreprises et les collectivités à la valorisation agricole des biodéchets.

Grâce à la création d’Organic’Vallée, la valorisation de la matière organique sur le territoire s’inscrit dans un projet d’économie circulaire plus large incluant des dimensions sociales, économiques et environnementales.

Le concept d’économie circulaire ne connaît pas de définition établie, mais nous retiendrons la définition de l’ADEME avec ses trois domaines d’action et ses sept piliers [Figure 3].

Si les activités de Cler Verts s’attèlent à un seul des trois domaines d’action de l’économie circulaire, la « gestion des déchets », la Scic Organic’Vallée intègre, elle, une partie des piliers des deux autres domaines d’action, l’« offre des acteurs économiques » et la « demande et le com-portement des consommateurs » [Figure 3] :
→ Écologie industrielle et territoriale : elle constitue un mode d’organisation inter-entreprises par des échanges de flux ou une mutualisation de besoins. Organic’Vallée répond à ce mode d’organisation créant des flux de matière et d’énergie entre l’aire urbaine de Toulouse, Cler Verts et les agriculteurs de la Scic.
→ Consommation responsable : le consommateur qu’il soit acteur économique ou citoyen consommateur effectue son choix en prenant en compte les impacts environnementaux du cycle de vie du produit. Organic’Vallée inclut à son activité la sensibilisation des consommateurs à la production agricole et à la valorisation des biodéchets ainsi que la formation des entreprises et des collectivités à la gestion des biodéchets. Cela participe à la prise de conscience des différents acteurs du territoire quant aux impacts environnementaux liés à leur comportement et à l’adoption de pratiques responsables.

QUELLES LIMITES POUR CE MODÈLE PROPOSÉ PAR ORGANIC’VALLÉE ?

Une réglementation contraignante pour les amendements organiques en agriculture biologique

Les agriculteurs de la Scic étant tous installés en agriculture biologique, les règlements CE n°834/2007 et CE n° 889/2008 sur les amendements organiques autorisés s’appliquent, limitant ainsi ces derniers aux déchets ménagers compostés ou fermentés triés à la source, aux mélanges compostés ou fermentés de matières végétales, sciures et copeaux de bois non traités, aux écorces compostées de bois non traités (ITAB, 2014). Les déchets ménagers compostés ou fermentés concernent les déchets ménagers d’origine végétale ou animale issus de l’alimentation ou des jardins des habitants, les déchets des artisans et commerçants, et les déchets des écoles, administrations, hôpitaux pouvant être collectés dans les mêmes conditions que les déchets des ménages (Institut national de l’origine et de la qualité, 2017).

De plus, le digestat obtenu par méthanisation et le compost ne doivent pas contenir de sous- produits animaux provenant de l’élevage industriel, défini comme « un élevage où les animaux sont la plupart du temps empêchés de se mouvoir librement et maintenus dans l’obscurité ou privé de litière » (ITAB, 2014).

La réglementation sur l’utilisation des amendements organiques en agriculture biologique est donc contraignante et limite actuellement l’utilisation d’amendements produits par Cler Verts sur la Scic au compost de déchets verts.

Une implication des collectivités est nécessaire

L’implication des collectivités dans ce modèle est nécessaire pour d’une part valoriser les gisements de biodéchets ménagers, pour le moment non intégrés dans les boucles de matière et donc non valorisés, et d’autre part permettre la valorisation agricole des biodéchets sur la Scic par rapport au modèle existant :
→ Les collectivités peuvent avoir des exigences plus strictes en termes de tri à la source des biodéchets que la plateforme de traitement des déchets privée proposant un service. Or ce tri est primordial pour obtenir un compost de bonne qualité et à moindre coût.
→ Si l’on considère le débouché en agriculture biologique, le compost produit à partir de bio-déchets ménagers est autorisé. La collecte des biodéchets des collectivités permettrait donc à Cler Verts de valoriser un compost de biodéchets sur le site de la Scic. Cela serait une nouvelle opportunité pour la création d’une unité de production de compost biologique, projet qui n’est pas encore à l’ordre du jour.

Organic’Vallée a porté la création d’un pôle territorial de coopération économique [3] (PTCE) en 2016, qui a permis d’intégrer des collectivités dans la démarche mais aussi des entreprises de l’économie sociale et solidaires, des associations, d’autres entreprises et des instituts de recherche. La création de ce PTCE permettra d’intégrer les biodéchets des ménages dans le modèle d’Organic’Vallée et favorisera la mise en place d’une valorisation des biodéchets optimale en suivant les propositions de l’ADEME (ADEME, 2017) :
→ mutualiser la gestion avec des acteurs privés du territoire pour optimiser les transports et monétariser le service de collecte ;
→ collaborer avec les chambres d’agriculture et impliquer les demandeurs de matière organique pour faire un état des lieux du besoin et adapter le traitement ;
→ mettre en place des politiques de diminution de la production de biodéchets avec une fréquence plus faible des passages de collecte ou une tarification incitative.

Toutefois, la mise en place de ces dispositifs nécessite un investissement initial conséquent et une aide financière pourrait être nécessaire dans les premiers temps.

CONCLUSION

Organic’Vallée présente une nouvelle approche organisationnelle pour la valorisation agricole des biodéchets pertinente. Elle permet de réunir l’offre et la demande, avec l’intermédiaire Cler Verts qui traite les biodéchets de manière innovante en proposant une optimisation de la collecte par filière et une gamme diversifiée de composts. Organic’Vallée propose plus qu’une simple solution de valorisation des biodéchets si l’on considère que ces flux et échanges de matières dynamisent le territoire, créent des synergies entre acteurs, apportent du savoir, des emplois, du lien social et développent des productions locales.

Cependant, la gestion des biodéchets peut aussi soulever en premier lieu la question de leur génération. Une approche « zéro déchet » doit être complémentaire, car le meilleur déchet reste celui qui n’existe pas.

Auteur : Camille Lacour


[1Biodéchet : tout déchet non dangereux biodégradable végétal ou alimentaire issu des ménages, des restaurants, des traiteurs, des magasins de vente au détail, des établissements de produc-tion ou de transformation de denrées alimentaires (Code de l’environnement, 2016).

[2Gros producteurs de déchets : les producteurs non ménagers, dont les biodéchets représentent plus de 50 % des déchets, et dont la production représente au moins 10 tonnes de biodéchets par an (Ministère de l’Écologie, du Développement durable, des Transports et du Logement, 2012).

[3Un PTCE est défini par un « regroupement sur un même territoire d’entreprises de l’économie sociale et solidaire en lien avec d’autres entreprises, des collectivités territoriales, des centres de recherche, des établissements d’enseignement supérieur et de recherche, des organismes de formation ou toute autre personne physique ou morale pour mettre en œuvre une stratégie commune et continue de mutualisation, de coopération ou de partenariat au service de projets économiques et sociaux innovants, socialement ou technologiquement, et porteurs d’un développement local durable » (ministère de l’Économie, 2014).